Le roman « La Vie des Choses », vainqueur du Prix du Livre de la Ville de Lausanne 2025

Lara Soumillion

Notre blogueuse Lara Soumillion a assisté à une interview de Marc Agron, le gagnant du Prix du Livre de la Ville de Lausanne 2025. Elle vous fait découvrir cet écrivain ainsi que son ouvrage La Vie des Choses, publié aux Éditions La Veilleuse.

Le lundi 20 janvier dernier, Marc Agron (au centre) a remporté la 11e édition du Prix du livre de la Ville de Lausanne.
(Photo Ville de Lausanne – Sarah Carp)

C’est la vitrine tout d’abord qui attire votre regard lorsque vous vous promenez dans les larges rues de Lausanne. Ce sont les rangées de livres anciens qui semblent s’élever jusqu’au ciel et vous arrêtent sur votre chemin. Ce sont les reliures en cuir marron et brunes qui vous décident à entrer, l’odeur de vieux papier et l’atmosphère magique qui vous fait rester. La librairie “Univers”, petit paradis caché des lecteurs lausannois, est tenue par le grand gagnant de la onzième et plus récente édition du Prix du Livre de Lausanne, Marc Agron.

Un passionné

Cet écrivain né à Zagreb a initialement écrit en croate. Sa créativité s’est tout d’abord manifestée sous la forme de poèmes écrits dans sa langue maternelle. Puis, vers vingt-cinq ans, il a écrit en français et est passé des poèmes aux romans. Pour le « fun fact », Marc Agron est un ancien élève de l’UNINE. Fierté de Neuchâtel, peut-être en inspira-t-il d’autres ?

Passionné de livres anciens, il a ouvert à Lausanne la librairie « Univers » qui s’avère être une double enseigne: l’étage, ajouté récemment, et la galerie, ouverte avec sa femme Michelle en 1966, qui expose des artistes contemporains.

Marc Agron s’amuse à regarder les passants qui entrent dans sa librairie, devinant s’il s’agit d’amoureux de livres. Cela se voit à la façon dont l’individu manie un ouvrage ancien, tourne les pages fragiles, repose le livre sur son étagère. Il suffit d’observer un peu pour repérer le lecteur accommodé à cet environnement.

D’ailleurs, certains d’entre vous ont sûrement un livre préféré. Peut-être même que vous en possédez plusieurs exemplaires. Peut-importe le nombre, vous ne dépasserez pas celui de Marc Agron qui n’a pas moins de cent huit éditions de Candide de Voltaire ! 

Une plume qui séduit

Dans  La Vie des Choses, le roman vainqueur écrit par Marc Agron, le personnage principal, Yann Mendelec, est incroyablement humain et ne correspond à la fois à aucune norme humaine. Nous nous identifions à Yann de façon presque grotesque, tout en éprouvant pour lui une répulsion face aux actions qu’il décide de prendre. Et pourtant, nous ne pouvons nous empêcher d’en vouloir plus, de savoir jusqu’où ce personnage est capable d’aller pour atteindre son rêve de gloire : devenir un grand écrivain. 

Une sorte de satisfaction perverse se met en place lorsque l’écrivain tiraillé qu’est Yann nous sert sur un plateau des actions de plus en plus inimaginables. Le lecteur est alors déboussolé, ne sachant plus quoi croire. On tient La Vie des Choses, un roman où les pages se tournent sans s’arrêter jusqu’à la dernière phrase.

51 versions différentes

Lors de la onzième édition du Prix du Livre de la ville de Lausanne, le livre de Marc Agron était le cinquième et dernier ouvrage présenté par Fanny Meyer, déléguée à la politique du livre à la Plateforme 10, le quartier des arts, qui se trouve à la place de la gare. Nous y avons vécu un échange riche en humour et en anecdotes et sommes entrés dans les coulisses de la pensée de l’auteur.

Tout d’abord, Marc Agron a tenu à préciser que La Vie des Choses, qui relate des éléments de sa propre vie, n’était pas une autofiction. Ce qui a eu pour effet de faire redoubler les rires lorsque, par mégarde, l’intervieweuse a appelé l’auteur par le nom de son personnage principal, Yann. 

Le roman vainqueur cette année, écrit par Marc Agron. (Photo personnelle)

D’après Marc Agron, chaque personnage du roman possède son antithèse. Par exemple, l’éditeur américain Estéban Lewis est le contraire de l’éditeur français Louis Van Berg. L’un, ami fidèle de longue date, l’autre, opportuniste et manipulateur et qui n’hésite pas à abandonner Yann quand la chance ne lui sourit plus. 

Les personnages de Marc Agron lui ont été inspirés par son entourage, notamment le nom de Rosemarie, que portait la mère d’une de ses amies, une femme qu’il chérit profondément et qu’il décrit comme étant « une sainte » plusieurs fois pendant l’interview. « Rosemarie » était d’ailleurs le nom initial du livre avant qu’il ne devienne La Vie des Choses. De plus, nous avons appris que son premier roman, Mémoire de cellules,publié en 2017, contenait déjà les personnages principaux de ses ouvrages futurs. 

Par ailleurs, cet ouvrage a mis trois ans avant d’être officiellement achevé et a été imprimé dans cinquante et une versions différentes avant que soit choisie la fin appropriée. En effet, l’éditeur de Marc Agron lui avait suggéré de terminer son livre en enlevant la dernière phrase. Et d’après l’auteur, cette suppression a drastiquement changé  la fin et son interprétation.

Clins d’œil

Lors de cette échange, en prononçant «Yvan» avec une intonation slave, les plus attentifs ont pu remarquer les quelques clins d’œil de Marc Argon à sa culture d’origine. De plus, les amateurs de sarcasme sont servis en lisant La Vie des Choses car, toujours selon l’auteur, ce procédé récurrent de l’humour slave permet de se moquer du pouvoir et de survivre à la dictature.  

Enfin, au-delà même du récit, il y a une richesse culturelle énorme dans cet ouvrage. Tant d’auteurs, d’artistes, de mythes, de références sont mentionnées que vous agrandirez à coup sûr vos connaissances. En attendant, si votre chemin vous mène un jour à Lausanne, n’hésitez pas à entrer, un moment au moins, dans la petite librairie « Univers ».

Je vous laisse sur ces belles paroles de Marc Agron. « Notre vie est une suite de nouvelles qui forment un tout. On passe d’une pièce à l’autre, comme on le ferait dans une maison ; d’une saison à l’autre. »

Les Tips et tricks d’un auteur affirmé  

Pour les futurs auteurs qui se cacheraient parmi vous, voici quelques conseils que nous avons pu retirer de cette interview. Tout d’abord, créer prend du temps. Rome n’a pas été bâtie en un jour et votre œuvre ne le sera pas non plus. Comme le dit Marc Agron, le texte doit devenir un livre avant d’être publié. Il veut que ses lecteurs puissent entendre une musique en le lisant, qu’ils voient une image, un tableau qu’ils rempliront au fur et à mesure.

De plus, il n’y a pas d’heure pour créer, pour écrire, pour être inspiré. C’est le grand avantage des artistes : pouvoir écrire n’importe quand. Marc Agron, lui, est un oiseau de nuit. Il écrit le soir, de 21h à 1h du matin. N’hésitez pas non plus à citer vos auteurs préférés ou à ajouter une subtile référence à un grand nom de la littérature. Marc Agron trouve toujours un moyen, au travers de ces œuvres, d’honorer Albert Cohen, Marcel Proust ou encore Georges Perec, pour ne citer qu’eux.

Sources

Suisse, R. T. (21.01.25). Le Prix du livre de la Ville de Lausanne revient à Marc Agron pour “La vie des choses.”  Consulté le 20.02.25 sur : https://www.rts.ch/info/culture/livres/2025/article/marc-agron-remporte-le-prix-du-livre-de-lausanne-2025-avec-la-vie-des-choses-28762964.html

Fanny. (06.04.20). Galerie de l’Univers. FLAC. Consulté le 07.03.25 sur: https://www.guide-contemporain.ch/lieux/galerie-de-lunivers/

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